Michael, de Markus Schleinzer

 

 
Michael de Markus SchleinzerSobre, efficace, le premier film de Markus Schleinzer, Michael, sur un pédophile séquestrant un môme d’une dizaine d’années dans sa maisonnette verdâtre de banlieue autrichienne emprunte à Michael Haneke son sens du cadre et de l’essentiel tout en s’accrochant au côté extrêmement terrien d’un Ulrich Seidl. Balançons donc une généralité : les Autrichiens ne sont pas du genre à prendre des détours. Ce premier film s’affiche totalement maîtrisé. Aucune vaine explication ne sera donnée. En un plan, on plante le décor, en un second, on partage une émotion, avec un autre, on raconte le passé des protagonistes. Ce long-métrage s’attaque aux entrailles d’un fait divers. Plus précisément même au lieu du crime. Alors que la télévision diffuse en fond sonore les statistiques d’enlèvements d’enfants, c’est dans la tanière du prédateur que la caméra du réalisateur autrichien pénètre, gardant toujours une distance, laissant le spectateur en périphérie, au bord.

La journée, l’homme est assureur. Dans son petit costume, il renseigne ses souscripteurs, ne se lie pas facilement avec ses collègues sans pour autant être désagréable. Un homme discret qui préfère passer Noël seul, loin de sa mère et de sa sœur, mais s’autorise parfois un séjour au ski avec deux amis. Chaque soir, il rentre chez lui, gare sa voiture dans son garage. La caméra reste à l’extérieur, s’attarde sur les rais de lumière qui disparaissent à mesure que les stores se baissent. Silence. Ce qui intéresse Markus Schleinzer, ce n’est pas l’enfant (dont il fait une victime résistante à la colère contenue) mais son ravisseur. D’ailleurs, souvent pour suivre ce dernier, le film abandonne le gamin pour suivre le parcours de cet homme au regard taciturne. Sa solitude, son mal-être, ses obsessions… Rien qui ne le rende sympathique ou ne le condamne lourdement. Les faits. Seulement les faits. Le malaise et l’incompréhension.

Dans le quotidien qu’il partage avec sa victime, Schleinzer observe froidement les gestes de tous les jours dont la banalité effraie. Effleure les peaux. Fixe un objet. Il écoute la violence muette. Une fois cet univers posé, la situation actée, il s’autorise même quelques traits d’humour. Acide. Amer. Troublant.

Michael, de Markus Schleinzer. Autriche, 2011. En compétition au Festival de Cannes 2011. Sortie le 9 novembre 2011.