Plateau télé : semaine du 24 novembre

 

Les Tontons flingueursCette semaine, le cinéma français à la gouaille populaire est en deuil. Mais la mort de Georges Lautner n’a pas pris la télé au dépourvu : France 2 dégaine Les Tontons flingueurs, comme elle le fait à intervalles réguliers, plus vite que son ombre (dès ce soir), et HD1 pioche allègrement dans le catalogue avec, lundi soir, Ne nous fâchons pas, le troisième film le plus diffusé depuis 1957 (qui devrait donc ainsi accéder à la deuxième place du podium, avec 23 diffusions), suivi du Guignolo (seulement 26e avec 18 passages). Plus subtil, et sans lien avec Lautner, Arte nous gratifie de Touchez pas au grisbi, de Jacques Becker avec Jean Gabin, adaptation de l’un des romans de la trilogie d’Albert Simonin, dont est issu Les Tontons flingueurs (Grisbi or not grisbi). Une semaine donc pour boire un coup avec des acteurs de légende, toujours servis par la langue d’Audiard, et le regard aujourd’hui clos de Lautner.
 

The Holiday, de Nancy Meyers – dimanche, 20h50 – TF1

TF1 lance les hostilités. Ça y est, c’est Noël. Et pas qu’un peu. Parce que The Holiday n’y va pas par quatre chemins. De la neige. De la musique. Des gens beaux. Des gens tristes. Des gens qui finalement se trouvent, et qui, miracle de Noël, s’aiment, et font des milliers de kilomètres sur un coup de tête, juste pour passer le réveillon tous ensemble. La moitié du casting fait dans le contre-emploi : Jude Law en papa poule (et pull bleu-Tintin) et Kate Winslet rayonnante. L’autre moitié fait ce qu’elle sait faire : Cameron Diaz arrogante (mais pas tant que ça), et Jack Black, rigolo au cœur tendre. En bonus, Eli Wallach en mémoire d’Hollywood est peut-être ce qui fait le charme de cette bluette sans autre ambition que de sacrifier à la tradition des bons sentiments enneigés de saison.
 

My Fair Lady, de George Cukor – dimanche, 20h45 – Gulli

Le charme de My Fair Lady est inusable. Sûrement la magie d’Audrey Hepburn, qui remplace Julie Andrews, créatrice du rôle dans la comédie musicale à Broadway. Et le pas de deux qui s’opère avec Rex Harrison, le rude professeur Higgins, décontenancé et quelque peu séduit par la nature de cette vendeuse de violettes de Covent Garden. A la suite d’un pari, le linguiste raffiné relève le défi de transformer la jeune femme à l’accent cockney – pour lui insupportable – en une véritable lady qui fera sensation aux très mondaines courses d’Ascott. Au cours de séance d’orthophonie pas toujours réglementaires, elle apprend à déclamer dans un anglais digne de Buckingham que « le ciel serein d’Espagne est sans embruns » (« the rain in Spain stays mainly in the plain », en VO), troque ses guêtres contre des robes de princesse, sans oublier d’où elle vient en rendant une visite épique à son père dans son pub habituel. Une vision des différences de classe, où les apparences l’emportent dans l’une et où le naturel, quoiqu’un peu rustre, prime dans la seconde. Un conte de fées qui prend la forme du regard mutin d’Audrey Hepburn.
 

Les Autres, d’Alejandro Amenabar – dimanche, 20h45 – France 4

Un manoir lugubre, la brume alentour, une femme vêtue de noir. C’est l’unique décor des Autres, qui voit évoluer Nicole Kidman, mère de deux enfants photophobes, dans une grande maison vide dans laquelle elle traque le moindre rayon de lumière. Un exercice de style pour Alejandro Amenabar, déjà auteur du très intrigant Ouvre les yeux, une ambiance entre angoisse et mélancolie, sans effets de manche, mais où le contraste entre la peau diaphane de Nicole Kidman et la noirceur de tout le reste glace les sangs.
 

Tous au Larzac, de C. Rouaud et C. Latour – mardi, 20h50 – Arte
Women are Heroes, de JR – mardi, 22h50 – Arte

Novembre étant le mois du documentaire, Arte en propose une dizaine cette semaine. Retenons Tous au Larzac, qui revient avec des images d’archives et les témoignages des acteurs du mouvement, sur la lutte des paysans du Larzac contre l’Etat dans une France post-Mai 68 ; et Women are Heroes, du photographe JR, qui affiche d’immenses portraits dans les rues. Le premier est le portrait poignant d’une utopie devenue réalité. La lutte pacifiste d’une poignée de paysans contre la puissance de l’Etat, l’histoire d’une mobilisation exceptionnelle, l’apprentissage du militantisme, citoyen et démocratique, le tout dans l’enthousiasme d’une jeunesse aux idéaux encore bien accrochés. Le second entend rendre hommage aux femmes qui se battent au quotidien dans des lieux défavorisés à travers le monde, au Brésil, en Inde ou au Cambodge, en affichant leur portrait sur les murs. Des femmes bigger than life, au sens littéral.
 

L’Auberge espagnole, de Cédric Klapisch – mercredi, 20h45 – France 4
Les Poupées russes, de Cédric Klapisch – mercredi, 22h40 – France 4

Le Casse-tête chinois de Cédric Klapisch sort la semaine prochaine. Il est donc temps d’une remise à niveau et d’une plongée dans la vie de l’Antoine Doisnel du réalisateur du Péril Jeune : Romain Duris-Xavier. Ses études à Barcelone en Erasmus et les interrogations de tout jeune étudiant à l’aube de l’entrée dans la vie active, qui laissent place à celles du jeune trentenaire à l’heure des choix et des premiers renoncements. Dans les deux, le même charme bordélique, la même naïveté, les mêmes certitudes capables de basculer sur un quai de gare. On suit avec plaisir l’évolution de tous les personnages : Martine-Audrey Tautou, toujours un peu chiante, Isabelle-Cécile de France, dont on envie la liberté, William-Kevin Bishop, un peu lourdingue mais sympa, et surtout Wendy-Kelly Reilly, bûcheuse qui ne demande qu’à se laisser décoincer. Une bande à laquelle on s’est attaché, et qu’on a hâte de retrouver.
 

Je vais bien, ne t’en fais pas, de Philippe Lioret – jeudi, 20h45 – France 3

On a déjà salué ici la sensibilité de Philippe Lioret, qui réussit à ne pas tomber dans la sensiblerie, d’une justesse toujours désarmante. C’est également le cas ici, où il filme l’absence, la quête, et le secret, toujours en s’intéressant aux regards, aux détails, avec une simplicité efficace. Il raconte surtout la chute et la remontée d’une jeune femme, bouleversée puis déterminée, et l’amour pudique d’un père, qui ne pense qu’à insuffler l’espoir, à tout prix. Mélanie Laurent, encore jeune actrice sans ses tics, et Kad Merad, étonnamment sobre. C’est aussi la force de Philippe Lioret : tirer le meilleur de ses acteurs.

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