Souvenirs de toiles de Didier Super

 

Didier SuperIl est définitivement Super barré le Didier avec son look de prof de ski vosgien en fin de carrière, bourré et fatigué. Humoriste, chansonnier, chanteur : il sévit un peu partout en France et régulièrement sur une péniche au pied de Notre-Dame : la Nouvelle Seine. Par “sévir”, comprendre que le bonhomme n’en finit pas de balancer ses vannes et ses drôles de chansons à la tronche d’un public abasourdi. Après s’être pris pour la réincarnation du Christ en 2010, le voilà qui revient avec un (presque) conte de fées : Ta vie sera plus moche que la mienne, l’histoire de Ludovic, fraîchement milliardaire grâce à un héritage improbable sur Internet, qui tente par tous les moyens de faire le bien autour de lui. L’occasion de taper sur les militaires, les civils, les Blancs, les Noirs, les bourgeois, les pauvres, et même sur les petits enfants qui meurent de faim dans le monde. Le potache joue des coudes avec le féroce, le mauvais goût est assumé et utile. Résultat ? On s’est penchés, comme ça pour voir si quelque chose de sérieux pouvait en sortir, sur les films qui avaient marqué l’esprit et l’existence de ce vilain garçon.
 
Le premier film vu ?

A coup sur, c’est Casimir !

Dans quelles circonstances ?

C’était l’heure d’aller dormir, mon frère, plus grand que moi, avait le droit de regarder. A force de pleurnicher, un jour, on m’a laissé regarder…

Mad Max 2Les films qui accompagnent l’adolescence ?

Sans hésiter, Mad Max 2 ! Je me souviens que je n’avais pas l’âge pour le voir au cinoche. A cause de ce film, j’ai grandi avec la conviction que l’an 2000, ça ne serait pas comme dans Star Trek, mais au contraire une espèce de Moyen Age post-technologique. Et puis en grandissant, je suis devenu plus optimiste.
Le XXIe siècle, en fait, c’est super cool, on se balade en t-shirt au mois de mars !

Le film qui fait grandir ? Pourquoi ?

Surement un Lelouch… On dirait que ce gars n’a qu’une obsession : tirer l’humanité vers le haut ! Sa version des Misérables, je la trouve franchement pas mal. En gros, ça dit un truc du genre “on est tous à la fois Valjean, Cosette, mais aussi Javert et Tenardier !” C’est pas mal d’entendre que bien sûr, il y aura toujours des enfoirés de dictateurs, des politiciens, des businessmen, que tu auras beau les supprimer, d’autres prendront la relève sur le champ, et que finalement, le seul vrai fumier à dégommer dans ce monde est caché dans notre trou de balle !

The RoadLe film le plus sombre ?

Ben dejà Batman, t’as l’impression qu’ils avaient pas le budget pour tourner dehors en plein jour !
Sinon, La Route, encore un film post-apocalyptique dans lequel papa trimballe son gamin dans un monde dévasté, sans vie où les rares êtres humains survivent en se bouffant entre eux, ou en bouffant leurs fœtus… Et la note positive finale du film, c’est quand ils découvrent deux cafards encore vivants. C’est cette vision qui leur rend l’espoir et là tu te dis que t’aurais dû te mettre un De Funès pour t’endormir plus vite !

Le film interdit qu’on essaie de se procurer par tous les moyens ?

Je sais pas… Un film en téléchargement illégal ? Aujourd’hui, interdire un film est un super bon moyen de lui faire une promotion. Regarde Dieudonné. A la limite, je vote pour un truc comme Les Nouveaux Chiens de garde qui explique que tu peux voter à droite ou à gauche, lire une presse de droite ou de gauche, de toute façon, tu as affaire exactement aux mêmes gens ! Et c’est vrai que ce documentaire est quelque peu “passé dans le beurre” alors qu’il y a d’excellents acteurs !

Le film pour emballer ? Ca a marché ?

J’ai bien tenté de faire le coup d’un Lelouch à une proie. Je lui ai montré Itinéraire d’un enfant gâté, un fond, une belle histoire et des images qui déglinguent ! Malheureusement, la “proie” avait enterré son papa quelques mois auparavant, elle est sortie en chialant et j’ai pas eu le point.

Sacha Baron CohenLe héros préféré ?

Sacha Baron Cohen parce qu’il arrive à nous faire croire qu’une partie de ses conneries ont l’air vrai.

L’héroïne ?

Je n’en ai pas. Je n’aime pas les héroïnes. Je suis macho, je préfère que les femmes m’admirent. A part Sœur Emmanuelle. Je suis certain qu’elle aurait pu ne pas être religieuse !

C’est quoi un film engagé ?

Un film engagé, c’est un film qui dénonce par exemple des “injustices” dans le but de divertir les gens, tout en leur faisant croire que ça les rend intelligents. J’ai un exemple de vrai chouette film engagé, c’est L’Ordre et la morale de Mathieu Kassovitz, qui parle des révolutions d’indépendance kanaks dans les années 1980, en Nouvelle-Calédonie et en particulier de ce groupe de Kanaks qui a pris en otage une gendarmerie sur l’île d’Ouvéa. La prise d’otages s’est soldée, grâce au gouvernement français de l’époque, par une boucherie et le film montre comment on aurait largement pu l’éviter. Le film a évidemment reçu un accueil médiatique plutôt “réservé”. Faut-il s’en étonner ? Même en Nouvelle-Calédonie, le seul cinéma de Nouméa, porteur du slogan “projecteurs d’émotions” a préféré ne pas porter la responsabilité d’émouvoir ses spectateurs calédoniens. C’est uniquement grâce à l’initiative audacieuse d’un “ciné-brousse” et de quelques associations locales que le film a pu être diffusé sur le territoire. Eh bien, de ce que je sais pour y être allé quelquefois, ce film a l’air d’avoir fait un peu de bien au pays du “non-dit”. Une œuvre utile.

Le film dont vous auriez aimé écrire le scénario ?

Gandhi. L’histoire d’un basané qui arrive à foutre dehors l’envahisseur anglais sur un territoire qui doit faire dix fois la France, juste avec quelques potes et un peu de bon sens ! C’est un peu de la science-fiction.

Didier Super sur scèneVous avez carte blanche, vous pouvez réaliser le film de vos rêves… De quoi parle-t-il ?

Ca fait longtemps que j’imagine l’histoire d’un jeune philanthrope qui n’en peut plus de voir l’inégalité des richesses, et qui met tout en œuvre pour devenir ultra-riche. On sait bien qu’aujourd’hui, faire énormément de fric, c’est possible. Plein de milliardaires n’ont pas le bac. Donc le mec devient très riche et commence à TOUT racheter puisque aujourd’hui, TOUT est à vendre (à part les Aveyronnais et deux ou trois autres…). Il devient alors le super-méchant contre qui tout le monde commence à se révolter. D’ailleurs, pour mener à bien son œuvre, il est obligé de neutraliser ses opposants alors que lui, il fait tout ça pour les aider, tu vois le truc de fou ? Au passage, il ne se gêne pas pour encaisser les ventes d’un merchandising clandestin anti-lui. Evidemment, les déclencheurs de ces émeutes seraient les ex-nantis de l’ancien système aujourd’hui bouleversé par le héros, à l’image de la France-Afrique. Et puis à la fin, il échoue, il abandonne le projet, garde le pognon et se casse en vacances en laissant tout le monde dans la mouise… C’est bien, non ?

Un méchant au cinéma que vous auriez pu incarner ?

Dans Girls with Balls, un truc qu’on tourne l’année prochaine. Il y a un super chouette méchant. En gros, c’est l’histoire d’une équipe de volleyeuses qui tombent en panne de bagnole au retour d’un match dans un endroit vide et glauque, genre la Champagne-Ardenne. Elles vont devenir le gibier d’une horde de chasseurs locaux. J’aurais pu faire le chef des chasseurs, mais ils ont préféré filer le plan à Gustave Kervern.

Un(e) réalisateur(trice) avec qui vous aimeriez dîner ? De quoi parleriez-vous ?

Sans hésiter, Jean Yanne. Je lui demanderais de me ramener un exemplaire des Chinois à Paris. J’ai un copain qui me l’a prêté et je sais plus ou je l’ai mis, sauf que là, ça commence à gueuler…

 
Quelques dates pour voir Didier Super sur scène : 3, 4, 5 avril / 22, 23, 24 mai / 5, 6, 7 juin à la Nouvelle Seine – Paris. Le 20 mai au Zénith de Lille.

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