Cinéma Master Class : trois inédits pour les vacances

 

De l’inédit. De la rareté. De l’exclusivité. De l’horreur. De l’amour. De la tragédie. De la romance. Trois films à découvrir ou à redécouvrir, comme dit la chanson. Une claque par Jerzy Skolimowski. Une baffe par Stanley Kramer. Une fessée par Lina Wertmuller. Du cinéma qui fait circuler le sang.

Le Cri du sorcier, de Jerzy SkolimowskiLe Cri du sorcier de Jerzy Skolimowski avec Alan Bates, Susannah York, John Hurt, Tim Curry…

Comme chaque année, le docteur Robert Graves organise un tournoi de cricket entre les membres de son asile psychiatrique et les habitants du petit village voisin. Afin d’arbitrer la partie, il s’associe au mystérieux Charles Crossley persuadé d’avoir le pouvoir surnaturel de tuer grâce à son cri. Le patient se lance dans le récit de sa vie, marqué par l’apprentissage de la magie chez une tribu aborigène d’Australie, au cours duquel il a tué ses deux enfants. Ce n’est que le début d’un parcours terrifiant, qui va le mener chez les Filding, un couple anglais tout ce qu’il y a de plus normal, sur lequel il va exercer son emprise maléfique.
Jerzy Skolimowski, compère de Roman Polanki avec qui il coécrit le scénario et les dialogues de son premier film, Le Couteau dans l’eau, représente la figure explosive du nouveau cinéma polonais des années 1960. Quand on évoque l’homme, on parle d’un cinéaste génial et touche-à-tout, un auteur de caractère capable d’atteindre les cimes de son art puis d’exploser en plein vol le film suivant. Si vous ne connaissez pas cet artiste culte, vous êtes de sacrés veinards !
Le Cri du sorcier s’inscrit dans la période britannique de son auteur. A l’instar de Roman Polanski, Jerzy Skolimowski n’hésitera pas à voir du pays pour échapper à la censure du système communiste (il tournera même aux Etats-Unis). Le Cri du sorcier, récompensé par le Grand Prix du jury à Cannes en 1978, rassemble la crème des acteurs britanniques autour d’un scénario inspiré d’une courte nouvelle du romancier Robert Graves. Une histoire fantastique absolument terrifiante. Un homme mystérieux s’incruste dans la vie d’un couple sans histoires et le menace de son pouvoir, un cri si puissant qu’il tue instantanément qui l’entend. Un peu comme la mouche qui pète mais en moins fort.
Skolimowski crée une œuvre sensorielle où le son devient l’élément moteur de l’image. Naît le trouble, une vilaine sensation d’insécurité où plane la magie d’un autre âge. La côte anglaise battue par le vent semble habitée par les esprits de la lande.
Fans de Roman Polanski, du Peter Weir de la première heure, de David Cronenberg et David Lynch, réjouissez-vous !

La Théorie des dominos, de Stanley KramerLa Théorie des dominos de Stanley Kramer avec Gene Hackman, Candice Bergen, Richard Widmark, Mickey Rooney, Elie Wallach…

Roy Tucker est un homme brisé. Vétéran du Vietnam où il a acquis une adresse incroyable au tir, il a tout perdu de retour à la vie civile, en tuant le mari violent d’Ellie, la femme qu’il aime. Résigné à passer sa vie en prison, la chance semble enfin lui sourire quand un mystérieux représentant du gouvernement lui offre la liberté en échange d’une unique mission, de sa totale collaboration et de son silence absolu. Il embarque pour l’Amérique du Sud avec pour consigne de tuer une figure politique importante. Mais les choses ne vont pas se passer comme prévues pour le mercenaire au cœur d’une conspiration tentaculaire.
La Théorie des dominos souffre de la comparaison des travaux de Sydney Pollack et William Friedkin, deux spécialistes du thriller politico-sociéto-psychologique acclamés à la même époque par la critique et le public. Sorti en 1976 dans un relatif anonymat, le film, ni transcendant ni honteux, semble noyé dans la masse des œuvres flamboyantes du Nouvel Hollywood. Stanley Kramer, avouons-le, grand faiseur de comédies sautillantes, n’est pas l’homme de la situation. La Théorie des dominos signera même la fin de sa carrière. Triste. Les interprètes prestigieux surclassent une mise en scène trop pépère. Pourtant, il y a assez de suspense et d’âpreté pour trouver à La Théorie des dominos un charme très « années 1970 » à la fois couillu et désuet.

D'amour et de sang, de Lina WertmullerD’amour et de sang de Lina Wertmuller avec Marcello Mastroianni, Sophia Loren, Giancarlo Giannini…

Aux prémices de la Seconde Guerre mondiale, alors que le fascisme s’empare de l’Italie, la mafia sicilienne est dévorée par des luttes intestines qui éclaboussent de sang les rues d’Italie jusqu’à celles de New York. Dans ce climat délétère, Titina perd son mari, brutalement assassiné par la pègre. Alors que Spallone, de retour d’un exil de dix ans, succombe aux charmes de la jeune veuve, Nick, un petit truand décidé à venger le meurtre de son cousin, revient au pays et s’éprend également de Titina. La rivalité entre les deux hommes grandit, et empoisonne la vie du trio, alors que la guerre approche…
Sophia Loren, veuve éplorée maquillée comme un camion volé, crie sa haine de la mafia. Les ruelles résonnent de ses pleurs. Marcello Mastroianni, affublé d’une fausse barbe, revient au pays l’air paumé, l’œil triste et la mine déconfite. Oui, mais pourquoi ? Giancarlo Giannini (acteur du cru aux mille rôles et acteur fétiche de Lina Wertmuller), sapé comme un maquereau, vocifère des insanités le cigare aux lèvres. Saleté de petite frappe !
Autant ne rien vous cacher. La vie à trois, c’est la chiotte ! On ne se partage pas Sophia Loren. D’amour et de sang est un film à l’italienne. Baroque, bruyant, coloré, bavard et généreux.

Le Cri du sorcier, La Théorie des dominos et D’amour et de sang sont disponibles en DVD et combo DVD/blu-ray chez ITV Studios.