Humeur cannoise #3 : Dépucelage

 

Mon dépucelage cannois – épisode 1 : Le retour des castes

Sculptures cannoises...On m’avait dit qu’il n’y avait pas un Festival de Cannes, mais des festivals. Que si l’un se révélait extatique, l’année suivante, il pouvait arborer un tout autre visage, bien plus odieux. Et inversement. Aussi, je ne savais guère à quoi m’attendre.
Cinq heures de train entre Paris et Cannes. Cinq heures dans un train matinal (7h19) bourré de journalistes en goguette qui saturent leur agenda de rendez-vous et de personnes qui refont le monde (« Moi je pense qu’Hillary Clinton eh ben elle sera pire que Donald Trump »). En arrivant à la gare de la ville aux palmes d’or, avec son simili tapis rouge pour amuser les touristes et les festivaliers, on sent que l’effervescence ne demande qu’à s’exprimer. Pour l’heure, on traîne ses bagages jusqu’à son hébergement pour les 12 jours à venir. On est un peu épuisé, mais grisé, petit à petit, par l’ambiance et la mer. La Croisette qui se devine, le Palais des festivals (à la laideur dissimulée sous la dorure et le pourpre) pour aller chercher son accréditation, celui de la Quinzaine des réalisateurs (pour une autre accréditation). Et là, petit à petit, on comprend qu’on arrive dans un autre univers. C’est bien simple, on a la sensation d’être en Inde, au temps des castes et des intouchables. Les plus fortunés seront les journalistes qui auront le sésame suprême qui leur permet d’accéder à toutes les sélections et sans faire la queue (ou presque). Puis, viennent les confrères des médias qui peuvent accéder à presque tout, mais avec moins d’égards. Puis, les pauvres hères qui n’auront qu’un badge pour la Quinzaine des réalisateurs, divisé en plusieurs couleurs également. Sans oublier le pass anonyme pour la Semaine de la critique que certains s’échangent sous le manteau. Les intouchables étant bien entendu le commun des mortels qui tente vainement de grappiller des invitations avec une petite pancarte en carton. Les sans-abri demandent à manger, eux, à boire du champagne avec Woody Allen. Un premier Cannes au bout de la France, mais qui semble pourtant au bout du monde…

Mots-clés : , ,