Listen to me Marlon, de Stevan Riley

 

Marlon par Marlon

Listen to Me MarlonC’est à partir d’archives personnelles, d’extraits de films et de documents télévisuels que Stevan Riley a, sans aucun doute, réalisé le portrait le plus complet de Marlon Brando, classé « 4e acteur de légende » par l’American Film Institute.

Dès ses débuts, Marlon Brando défraie la chronique. Cette gueule d’ange posée sur un corps félin donne un sale coup de vieux aux déjà vieux de la vieille, les bien nommés Humphrey Bogart, Cary Grant et James Stewart. Il n’est pas question de dénigrer le talent des trois premiers acteurs de légende classés par l’AFI mais le paysage cinématographique connaît un avant et un après Brando. Même s’il installe une salutaire sauvagerie sur les écrans de cinéma, Brando ne ringardise rien ni personne. Armé d’un jeu « faussement » à l’instinct, il propose autre chose qu’un jeu à la papa où le froncement de sourcil complice sert de mètre étalon à des contingents d’acteurs et d’actrices formatés. En 1951, Un tramway nommé désir bouleverse les codes du charisme au masculin. Les femmes et les hommes se rêvent en Brando et transpirent. La ménagère frétille. Discrètement.
Pendant 98 minutes, Brando se laisse aller à la confidence et raconte son histoire. Son enfance, ses débuts, ses errements, ses enfants. Brando aime ses enfants plus que tout, lui qui comme sa mère a subi la violence de son père. Le reste n’est que billevesée.
Stevan Riley accumule les confessions intimes autour d’un point névralgique de la vie du monstre sacré, l’assassinat du fiancé de sa fille Cheyenne par son fils Christian. Le meurtre de Dag plonge Cheyenne dans le désespoir. Harcelée par la presse à sensation et la Justice, Marlon surprotège sa fille chérie jusqu’à son suicide par pendaison en 1990.

Brando revient sur ses hauts et ses bas. Avec sincérité, sans aucune ambiguïté, il avoue préférer privilégier son train de vie démentiel à des rôles sans enjeu. Le père de Superman, mais quelle connerie ! Le système lui file la gerbe, Hollywood produit de la merde, Brando décide de baiser le système et Hollywood. Dès la fin des années 1960, l’acteur enchaîne les nanars pour payer les toitures. Le nabab qui désormais préfère le soleil de Tahiti vaut 1 million de dollars la ligne. Les grandes demeures appellent les grandes factures. Et puis vient le temps du Parrain et d’Apocalyspse Now, le temps de la fuite en avant, le temps de dire merde à qui veut l’aimer, le temps d’expier ses péchers devant la nation indienne. Brando is back but Brando is dead.
Cet artiste est un paradoxe vivant. Un monstre sacré. Un vrai.
Un documentaire très recommandé.

 
Listen to me Marlon de Stevan Riley. Angleterre, 2015. Disponible en DVD chez Universal Pictures Vidéo.