Gérardmer 2014 : morceaux choisis

 

Festival du film fantastique de Gérardmer 2014Dans deux jours, quatre trublions de notre équipe, tous assoiffés de cinéma fantastique, s’en iront, moignon contre moignon, en direction de Gérardmer, assister à la 21e édition de son Festival international du film fantastique.

On le sait mais c’est toujours important de le rappeler, se rendre à Gérardmer, ça veut dire :

- Ne pas tomber en panne.

- Ne pas se séparer.

- Se méfier de la jolie fille sympa en mini-short et débardeur. Au mois de février dans les Vosges, c’est suspect.

- Ne pas se réfugier dans une bicoque isolée, perdue dans la forêt.

- Ne pas faire copain-copain avec le premier gamin blafard au regard vide rencontré en chemin. Si le petit a faim, lui donner de préférence quelques euros pour qu’il puisse s’acheter une friandise de son choix et passer son chemin.

- Préférer la lampe torche à la simple boîte d’allumettes.

- Eviter de trop fouiner derrière les portes, sous les lits, dans les placards. Les plus curieux à Gérardmer sont souvent les premiers à y passer.

- Ne pas courir au premier étage lorsque l’on veut quitter précipitamment une maison. Emprunter plutôt une issue au rez-de-chaussée, comme la porte d’entrée par exemple.

- Et enfin, un détail, penser à bien faire ses lacets…

En respectant ces quelques règles simples et de bon sens, nos quatre fantastiques auront peut-être une chance de survivre et, ainsi, de vous faire partager leur aventure vosgienne. En attendant, voici quelques morceaux choisis au menu de cette édition 2014 qu’on a hâte de déguster :
 

Miss Zombie, de Sabu

Une cage. A l’intérieur, une jeune femme au corps scarifié et criblé de bleus. Elle s’appelle Sara. Elle est zombie. Tel est l’étrange colis que Teramoto, un docteur argenté, trouve un jour devant sa porte, accompagné d’une note d’instructions – “Ne pas lui donner de viande – peut devenir violente” –, ainsi que d’un revolver. Il décide de l’accueillir au sein de sa famille, auprès de Shizuko, sa femme, et Kenichi, son fils, pour en faire leur servante docile. Quelque part entre l’animal de compagnie et l’objet sexuel, Miss Zombie essuie humiliation sur humiliation. Seuls Shizuko et Kenichi semblent lui témoigner de l’empathie et lui prêter quelques attentions humaines…

Enième variation sur la thématique éculée des morts-vivants, Miss Zombie nous réjouit pourtant par avance tant la perspective narrative et esthétique retenue par le réalisateur semble originale. Après dix années passées à louvoyer entre des commandes de studio à gros budgets, le cinéaste japonais Hiroyuki Tanaka, aka Sabu, renoue avec un projet à taille humaine… Cinq jours de tournage, un noir et blanc mélancolique et une réflexion sensible autour de la précarité des liens familiaux et d’une espèce humaine dégénérée. Déjà encensé en septembre dernier dans le cadre de l’Etrange Festival, Miss Zombie pourrait être l’excellente découverte de ce Festival de Gérardmer.

 

Dark Touch, de Marina de Van

Actrice, scénariste ou réalisatrice, avec François Ozon ou en solo, Marina de Van s’est toujours baladée à la lisière du fantastique – dans la lignée de l’approche rationaliste du cinéma de genre français, souvent peu à son aise avec les postures et les postulats qu’imposent diableries et histoires surnaturelles. Avec Dark Touch, elle ose enfin pénétrer dans les ténèbres en signant un pur film d’épouvante à vocation internationale. Tourné en Irlande avec un casting du cru, il y est question d’une famille massacrée par une maison tueuse et d’une fillette traquée et harcelée par des forces démoniaques qui ont une sainte horreur du travail inachevé. Un canevas et une facture certes classiques qui, s’ils sont maîtrisés dans les règles de l’art, offriront un shoot salutaire de terreur à l’ancienne.

 

Discopathe, de Renaud Gauthier

Et si, contrairement à l’adage, la musique n’adoucissait pas les mœurs ? Et si détester un style musical était lié à une cause physiologique ? Le Canadien Renaud Gauthier répond à ces interrogations existentielles en retraçant l’épopée meurtrière de Duane Lewis, un jeune New-Yorkais des années 1970, viscéralement et dangereusement allergique aux sonorités d’une nouvelle musique à la mode : le disco. On se prend à espérer une mise en scène délicieusement vintage, dopée à la colombienne et bourrée de brushings à la Farah Fawcett, qui se mettrait dans les pas d’un apprenti serial-killer sévèrement fâché contre les clients du Studio 54.
Tremblez, étalons moustachus à moule-b*** et dancing queens en shorts satinés ! Duane Lewis a la fièvre… et pas que le samedi soir, apparemment.

 

We Are What We Are, de Jim Mickle

Certes, on triche un peu, parce qu’on a eu l’occasion de voir We Are What We Are à la Quinzaine des réalisateurs cannoise l’année dernière. Mais l’histoire de cette famille qui cache un lourd secret et honore un macabre rituel a emballé ceux qui ont vu le film, et attise la curiosité des autres. Le mythe du cannibalisme a toujours été un fantasme du cinéma horrifique. Ici, et contrairement à Somos lo que hay, dont We Are What We Are est le remake, la question du cannibalisme est prolongée par le biais de la maladie du prion, ajoutant une réalité au récit familial. Un remake en opposition avec l’original, voilà déjà une bonne raison de le voir.

 

Ablations, d’Arnold de Parscau

A demi-nu dans un terrain vague, un homme se réveille sans aucun souvenir de la veille, une cicatrice au bas du dos. Une ancienne maîtresse, chirurgienne, lui apprend qu’on lui a volé un rein. Obnubilé par ce vol, il va tout sacrifier pour le retrouver : sa famille, son travail… Jusqu’à sombrer dans la folie.

Auréolé de sa collaboration avec David Lynch pour qui il a réalisé le clip vidéo Good Day Today, Arnold de Parscau viendra, du haut de ses vingt-cinq ans, présenter son premier long-métrage. On avait déjà pu découvrir son univers insolite dans son court Tommy. Huit minutes très abouties déroulées comme un tableau onirique et mélancolique. Une atmosphère singulière que l’on espère retrouver dans Ablations, fruit du travail complice entre Arnold de Parscau et Benoît Delépine, auteur du scénario. Les premières rumeurs évoquent le récit d’une lente descente aux enfers. Un road-movie à l’humour très noir – quelque part entre Lynch et Polanski – et au casting français très intrigant (Denis Ménochet, Yolande Moreau, Philippe Nahon…).