The Neon Demon, de Nicolas Winding Refn

 

La plastique c’est fantastique

The Neon Demon, de Nicolas Winding RefnAprès une balade en prison ultraviolente (Bronson), une épopée viking métaphysique (Le Guerrier silencieux), un thriller mécanique éthéré (Drive) et un film de vengeance étourdissant (Only God Forgives), il restait encore au Danois Nicolas Winding Refn à pénétrer l’univers magnifique et futile de la mode. Inspiré, de son propre aveu, par la beauté qu’il côtoie tous les jours (auprès de sa femme, de ses deux filles et des actrices et mannequins rencontrés sur les tournages de films et publicités), NWR a ainsi mis en branle The Neon Demon. Une plongée ultra-esthétisée dans le Los Angeles des top-modèles, où la concurrence fait rage. On y croise Jesse (Elle Fanning), fraîchement débarquée à L.A. pour devenir mannequin. Belle et naïve, elle va rapidement comprendre, au contact des autres beautés croisées, que si l’homme est un loup pour l’homme, l’apprentie mannequin est pour les autres un véritable requin. Au gré de séquences assourdissantes à l’époustouflante symétrie graphique (mentions à la directrice photo Natasha Braier et au compositeur Cliff Martinez), Jesse va adopter les codes de la mode et repousser tous ceux qui lui tendent la main. Et le film sombre ainsi dans l’horreur morbide, scènes choc à l’appui qui tranchent avec la beauté plastique et ingénue des mannequins. Mais étrangement, alors que les précédents films de NWR s’assemblaient pour former une œuvre filmée impeccable, The Neon Demon semble victime de son objet et se cantonner à la superficialité. Derrière la technique – impressionnante –, pas d’enjeu, pas de complexité, pas de vision singulière d’un monde pourtant fait de fantasmes. The Neon Demon est plus proche du Cremaster de Matthew Barney ou du Lost River de l’élève Ryan Gosling que de la magnificence de Drive. Un film en plastique ?

 
The Neon Demon de Nicolas Winding Refn, avec Elle Fanning, Karl Glusman, Jena Malone, Desmond Harrington, Christina Hendricks, Keanu Reeves… Danemark, Etats-Unis, France, 2016. En compétition au 69e Festival de Cannes. Sortie le 8 juin 2016.