Personal Shopper, d’Olivier Assayas

 

Fantôme contre smartphone

Personal Shopper, d'Olivier AssayasMaureen est « acheteuse de mode » pour des personnalités médiatiques. Elle a également un frère jumeau, Lewis, qui vient de mourir. Parallèlement à ses visites dans les grandes boutiques parisiennes et londoniennes pour habiller sa people de patronne, elle attend, les yeux et les oreilles grands ouverts, un signe de Lewis, preuve d’une vie après la mort.

Olivier Assayas est un cinéaste cérébral. De Désordre à Sils Maria, d’Irma Vep à Demon Lover, l’ancien des Cahiers du cinéma amène à réfléchir sur la condition humaine, sur la vieillesse, sur le destin, sur le pouvoir. Alors quand il décide de s’écarter – légèrement – de la réflexion pure et de faire place à la perception, forcément, ça bouscule. Lui le premier : Personal Shopper est plus confus que son stupéfiant prédécesseur, Sils Maria. Il raconte moins de choses, il est moins fort. Il ne met pas en valeur ses actrices, il n’est pas démonstratif. Personal Shopper n’est pas Sils Maria 2.

A défaut de former un tout, ce nouveau long est un puzzle. Une sorte de portrait en mosaïque de Maureen – incarnée par sa nouvelle égérie, Kristen Stewart – qui se soucie moins de narration que de sensations. Assayas oppose deux mondes, puis les réunit pour mieux en abolir les frontières : celui, superficiel, de la mode et celui, fantastique, des esprits. Les éléments de genre du film commencent dans une vieille demeure pleine de toiles d’araignées, avant de prendre vie dans un iPhone. Victor Hugo faisait tourner les tables, Maureen envoie des textos. Aux esprits ? A un tueur ? A elle-même ? Qu’importe. Personal Shopper est le moment mystique auquel chacun peut être un jour confronté. Si le film manque d’enjeux, il vaut au moins pour ses quelques belles séquences, sa Kristen Stewart à contre-emploi, sa vision sobre et singulière des ectoplasmes… Et, last but not least, la prise de risques de son réalisateur.

 
Personal Shopper d’Olivier Assayas, avec Kristen Stewart, Lars Eidinger, Nora Von Waldstatten, Anders Danielsen Lie, Sigrid Bouaziz… France, 2016. Prix de la mise en scène du 69e Festival de Cannes. Sortie le 19 octobre 2016.