Le Discours d’un maire

 

Image de fin du mondeUne fois n’est pas coutume, on n’a vu personne s’endormir, souffler, bavarder ou sortir fumer une clope pendant un discours d’ouverture de festival… Car à Gérardmer, c’est le maire adjoint Jean-François Duval qui se colle à cet exercice protocolaire. Et le public, habitué et visiblement très fan des prestations du bonhomme, était tout ouïe et extrêmement réactif à ses envolées lyriques. Alors on vous le livre tel quel…

« Je me trouvais, il y a quelque temps, alors que la tenue du Festival 2012 n’était pas encore certaine, au milieu d’éminents philosophes de comptoir de la célèbre école du Café du commerce, quand l’inévitable question récurrente surgit : “Est-ce que le festival aura lieu… en 2013 ?” Je me suis étonné de cette totale révolution diachronique : traditionnellement cette interrogation succédait à l’édition de l’année ; là, elle la précédait ; le futur avant le présent ; 2013 avant 2012.

Voici quelques éléments de réponse.

La première problématique est celle du financement. Pour 2013 ? J’ai sollicité quelques héros du fantastique avec des réponses favorables : Batman et Superman m’ont spontanément offert leur aide, mais plutôt technique m’ont-ils précisé, comme la prise en charge des invités américains qu’ils transporteraient directement à Gérardmer. A noter qu’ils regrettent de ne pas être disponibles en 2012 pour Ron Perlman.

Toujours pour le financement, on peut aussi, dans un élan d’enthousiaste naïveté, espérer que le Spider-Man spinalien acceptera enfin de financer quelques toiles.

Mais tout cela est bien aléatoire et de toute façon l’avenir du festival dépend d’une incertitude planétaire : que sera le monde en 2013 ?

Vous savez tous maintenant, comme l’avait déjà annoncé un guide indien à notre petit groupe de touristes visitant Tikal au Guatemala en 2001, qu’un cycle du calendrier maya s’arrête le 21 décembre 2012 sur un alignement exceptionnel des planètes. Aux dernières nouvelles, Nostradamus et les douze sibylles auraient confirmé cette prophétie de fin du monde, inscrite dans les pétrographes mayas et dans le Popol Vuh, leur livre des dieux et des mythes.

Aux Etats-Unis, le nombre des “survivalistes” qui s’achètent des abris ou d’autres dispositifs de survie ne cesse de croître, comme le montre Take Shelter, le film de Jeff Nichols dont on parle beaucoup depuis un mois : pour répondre à ses effrayants cauchemars apocalyptiques, le père de famille agrandit son abri anti-tornade au fond du jardin.

Alors même si les bénévoles gérômois et le personnel des services techniques de la ville font partie des rescapés du 21 décembre, même si l’opiniâtre président de l’association sort indemne du bunker qu’il se construit chemin des Epinettes, quel festival pourraient-ils organiser sans films, sans salles pour les projeter et sans public pour les visionner ?

Remarquez, ils seraient bien capables de relever le défi…

“Le sommeil de la raison produit des monstres”, nous avertit Francisco Goya dans une gravure de sa série Les Caprices.

Recouvrons donc notre raison et oublions les spéculations sur 2013 et son festival. L’édition 2012 se suffit à elle-même ; elle est riche en films, en événements, en personnalités. Tous les acteurs qui œuvrent à sa réussite ont donné, une fois encore, le meilleur d’eux-mêmes pour votre confort et votre plaisir. Appréciez ce festival à sa juste valeur, savourez sans retenue l’instant présent. “Carpe Diem”, comme on dit en patois dans les vallées vosgiennes. le Festival 2012 est à vous, vivez-le pleinement “là où n’est qu’ordre et beauté, luxe, calme et volupté”… à Gérardmer.

Bon festival. »

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