Sélection DVD de la rentrée

 

Point de cartables, point de pleurs, point de marronniers,
Haut les cœurs les amis, voici les nouveautés,
Misérable, captive, espion, c’est en DVD,
Que tous ces héros sous vos yeux pourront briller.

 
Torpedo, de Matthieu DonckTorpedo réalisé par Matthieu Donck avec François Damiens, Audrey Dana, Christian Charmetant, Gustave Kervern…

Michel Ressac reçoit un coup de téléphone de Pascal Dumont du magasin Sofa Life qui l’informe qu’il vient de gagner un repas avec l’idole des idoles, l’immense Eddy Merckx. Ressac est le loser flamboyant dont les échecs du passé ont cassé les pattes. Son amour s’est tiré, ses idéaux avec. Michel trouve là l’occasion inespérée d’organiser la fête chez son père fou de bicyclette avec qui il a perdu tout contact. Mais voilà, la condition sine qua none d’enlever le prix, c’est de se présenter en famille chez Sofa Life. Mais de famille, il n’y a plus. Sans se démonter, Michel rappelle son ex et engage un gamin du quartier pour jouer son fils. Famille Ressac nous voilà !
Après une série de quiproquos rigolos, Torpedo vire au « camping car movie » mais c’est toujours de Michel Ressac dont il est question et de sa resocialisation. La reconstruction du personnage principal passe par sa désintégration ; campé par Damiens, je vous laisse imaginer ! Sans cabotinage, c’est encore plus appréciable. Audrey Dana joue l’ex-compagne avec panache.
Torpedo s’inscrit dans la veine du cinéma belge caustique qui ne cesse de rayonner depuis la consécration de Benoît Poelvoorde et son C’est arrivé près de chez vous. François Damiens, nouveau leader de ces Belges forts en gueule toujours plus insupportables mais toujours plus attachants, assure de fleurir à sa manière le quotidien du « plat pays qui est le sien » plus connu pour son anxiogène grisaille que pour son ambiance azuréenne.
Entre deux facilités, Torpedo distille un étrange et joyeux désenchantement qui insuffle aux débordements (les passages avec Charmetant valent le coup d’œil !) ; un humour bon enfant tout à fait communicatif. Qu’est-ce qu’on se marre !
Disponible en DVD chez Bac Vidéo.

La Maison Russie, de Fred SchepisiLa Maison Russie réalisé par Fred Schepisi avec Sean Connery, Michelle Pfeiffer, Klaus Maria Brandauer, Roy Scheider…

Avant de recevoir le Blu-ray, je ne me rappelais plus du tout de ce que pouvait être La Maison Russie à part une ligne parmi d’autres sur la fiche Wiki de l’immense acteur écossais. Un film d’espionnage adapté de John LeCarré avec Sean Connery, Michelle Pfeiffer, Klaus Maria Brandauer et Roy Scheider, il y a plus avarié comme mise en bouche. Résultat : deux heures de bonheur. Pas de méprise, La Maison Russie n’est pas un chef-d’œuvre mais le résultat d’une mise en scène efficace, d’un scénario tout autant efficace et d’interprétations solides. Un film carré !
Barley Blair, éditeur britannique, se rend régulièrement à Moscou pour rencontrer des écrivains et des intellectuels. Lors d’une foire au livre, il fait la connaissance de Dante, un discret opposant au régime, physicien de métier, qui désespère d’une possible démocratisation du régime. Quelque temps plus tard, de retour dans la capitale soviétique, Blair reçoit par l’intermédiaire de Katya, une amie de Dante, un document qui décrit les failles de la défense soviétique. Alertés par leurs agents, les secrets britanniques qui veillent au grain persuadent Blair de travailler pour eux. Sa mission sera celle de s’assurer que Dante ne trompe pas son monde.
Une fois tous les éléments mis en place, c’est un vrai régal ; le Secret Intelligent Service et le KGB usent de stratagèmes pour s’assurer de l’authenticité des documents et par là même des principaux protagonistes. Suspense assuré. Un film classe.
Disponible en Blu-ray chez Filmedia.

Jeanne captive, de Philippe RamosJeanne captive réalisé par Philippe Ramos avec Clémence Poésy, Thierry Frémont, Mathieu Amalric…

Quand Philippe Ramos s’empare d’un personnage, nous pouvons être sûrs qu’il le décortique jusqu’aux os dans le dessein d’en tirer la substantifique moelle. C’est de cette manière qu’il s’est approprié de la plus belle des façons la vie du capitaine Achab, pauvre petit garçon devenu roi des océans.
Au tour de Jeanne d’Arc. Jeanne est la prisonnière d’un seigneur du nord de la France. Elle attend d’être vendue aux Anglais.
Jeanne captive, c’est la Jeanne mutique, sans le Verbe, abandonnée. Blessée à la suite d’une tentative d’évasion, Jeanne s’enferme dans le silence. Immobilisée, elle refuse de se nourrir. Les voix du Seigneur l’ont abandonnée. Dieu et les hommes ont scellé son destin. Tour à tour un guérisseur, un officier anglais et un prédicateur, saisis par sa grâce, tentent de la sauver.
Clémence Poésy incarne (c’est bien le mot !) une Jeanne exténuée, sourde, impénétrable. Les intentions de Philippe Ramos sont évidentes ; Jeanne demeure muette mais son amour résonne tout autour, son magnétisme hante la nature et le cœur de ceux qui savent entendre et écouter. Au creux de la vague, Jeanne captive va de symbole en symbole.
Certains trouveront le film poseur et intello. Je l’ai apprécié comme lyrique et respectueux.
Disponible en DVD chez Blaq out.

Papa longues jambes, de Jean NeguslescoPapa longues jambes réalisé par Jean Neguslesco avec Fred Astaire, Leslie Caron, Larry Keating, Robert Adler…

A la revoyure, comme on dit dans mon pays, Papa longues jambes est un drôle de film. Jarvis Pendelton, un richissime industriel américain de passage en France, s’éprend d’une jeune orpheline de 18 ans. Coup de foudre. Mais dix-huit printemps, c’est jeune. Il décide donc de se garder l’adorable Julie sous le coude en lui finançant des études aux Etats-Unis. Pour être encore plus clair : quand elle sera prête ou sexuellement active, il compte bien lui en mettre un bon coup derrière les étiquettes histoire de bien lui déboucher les écoutilles. Jarvis garde le secret car la demoiselle ne sait rien de ses attentions. Voilà qu’ils se rencontrent au bal du printemps. Cui cui.
Papa longues jambes, à défaut de faire passer les Français pour de véritables ploucs arriérés, exhale pendant près de deux heures des fragrances de misogynie très primaires. Mettons de côté ces complexes représentations de la nature humaine pour une approche plus fun de la chose.
Les tableaux chorégraphiés par Roland Petit et Fred Astaire vous clouent littéralement sur place à tel point qu’ils feraient presque oublier le fil de l’histoire. Quand deux génies de la danse travaillent de concert (paraît que Petit le classique et Astaire l’aérien ont mis un temps certain à s’apprivoiser), le plaisir éprouvé est décuplé. Astaire et Caron illuminent la scène de leur énergie. Ensemble, c’est le printemps qui chante. Cui cui.
Papa longues jambes ne manque pas de charme. Du vrai cinéma à la papa. Image superbe et des bonus très complets. Recommandé.
Disponible en DVD et Blu-ray chez Filmedia.

Bunker, de Evgeniy EfremovBunker réalisé par Evgeniy Efremov avec Boris Galkin, Evgeniya Gladiy, Mikhail Efremov, Pavel Trubiner…

Automne 1942. Un commando russe composé de forts en gueule et forts en bras est envoyé en Ukraine afin de réunir un maximum d’information sur la stratégie de défense de l’ennemi nazi. Des bruits courent qu’Hitler supervise les opérations depuis un camp de commandement situé au nord du pays, tapi au cœur d’un bunker. L’Armée rouge charge le commando d’éliminer le Führer.
Bunker commence fort puis se délite peu à peu pour devenir franchement ennuyeux. Plus le temps passe, plus on se demande pourquoi tout va si vite. On comprend mieux les raisons de ce charcutage mal avisé (d’une intrigue qui se nourrit du genre guerre et espionnage) quand on sait que Bunker le film est tiré d’une série de 4 épisodes de 52 minutes. Tentez plutôt la série.
Disponible en DVD en Blu-ray chez Aventi.

Les Adieux à la reine, de Benoît JacquotLes Adieux à la reine réalisé par Benoît Jacquot avec Léa Seydoux, Diane Kruger, Virginie Ledoyen, Xavier Beauvois, Michel Robin…

Cet été, je me suis pris de passion pour les biographies de Stephen Zweig. Une fois terminée celle consacrée à Marie-Antoinette, je revoyais dans la foulée Les Adieux à la reine qui prenait le parti original de raconter Versailles à travers le prisme d’une jeune servante, Sidonie Laborde, lectrice personnelle de la reine Marie-Antoinette.
L’histoire commence le 14 juillet 1789. Versailles bruisse de rumeurs. Une indicible peur s’empare de la Cour. Les premières calèches quittent le château. La reine quant à elle ne voit rien, n’entend rien, ou peut-être ne veut rien voir, ne rien entendre, elle qui s’affaire à choisir avec soin de nouvelles étoffes pour des robes toujours plus extravagantes. Sidonie, sous l’emprise de Marie-Antoinette, ne veut pas croire qu’au-dehors le peuple gronde. Versailles est une forteresse imprenable.
Suivre Sidonie, c’est l’idée principale. Derrière elle, nous visitons les coulisses insalubres où les petites gens, ceux-là même qui se nourrissent chaque jour d’un quignon de pain rassis, préparent dans l’insouciance les festins quotidiens destinés aux intrigants. Au détour d’un couloir venteux errent quelques vieux marquis désespérés, le roi refuse de leur adresser un regard, le peuple désire leur couper la tête. Une page se tourne. Sidonie jalouse la favorite, Gabrielle de Polignac. Le navire sombre, un départ est imminent.
Les Adieux à la reine sonne juste. On y croit. On croit à cette fin programmée, à cette cacophonie armée de courtisans poussés dans l’urgence à tirer leur révérence. Diane Kruger, au charmant petit accent, est une sublime Marie-Antoinette, lunaire et capricieuse, Virginie Ledoyen une vénéneuse Gabrielle de Polignac.
Tout l’intérêt des Les Adieux à la reine réside dans l’héroïne Sidonie (personnage imaginaire interprété avec sobriété par Léa Seydoux), tiraillée entre deux mondes, qui se fait le témoin du pôle névralgique de la France à l’aube d’une révolution.
Petit bémol avec la supposée relation amoureuse un peu appuyée entre la reine et la Polignac qui n’apporte rien au propos. Une visite (avant fermeture) très recommandée.
Disponible en DVD et Blu-ray chez Ad Vitam.

» Lisez aussi l’interview de Benoît Jacquot à propos de son film Les Adieux à la reine


Bullhead, de Michael RoskamBullhead réalisé par Michael R. Roskam avec Matthias Schoenaerts, Jeroen Perceval, Jeanne Dandoy…

Au Festival international du film policier de Beaune 2011, Bullhead nous mettait KO. Quel souvenir et quel réveil ! C’est le genre de séance dont vous sortez avec l’impression de vous être pris une rouste.
Michael Roskam est le premier réalisateur à traiter frontalement du trafic d’hormones qui a touché la filière « viande » en France et en Belgique durant les années 1980-1990. Cet empoisonnement orchestré par des agriculteurs et des vétérinaires a bien heureusement réussi à provoquer une prise de conscience chez les politiques, les professionnels de la profession et un salutaire changement de comportement chez les consommateurs. Une tranche de bidoche qui rétrécit de moitié dans une poêle et qui pue la sardine, ce n’est quand même pas normal !
L’histoire. Jacky Vanmarsenille est un homme bourru, un taiseux au physique hors norme. La ferme familiale fricote avec la mafia depuis que le père a développé les moyens de production. Il en faut toujours plus. Jacky s’occupe des bêtes. Aussi, derrière ce masque impassible, Jacky cache un terrible secret. Tous les jours, il se charge et charge les bœufs.
Pour son premier long-métrage, on a un peu l’impression que Michael R. Roskam a voulu trop en dire et trop en faire de peur d’oublier en alternant les genres (drame, thriller, policier, comédie) et en syncopant la narration.
Pas trop épais le scénario, merci ! Le film mériterait d’être dégraissé, débardé pour encore mieux en apprécier l’énergie et les messages délivrés.
Matthias Schoenaerts a pris 17 kilos de muscle pour incarner Jacky. Souffle rauque, cou de taureau, son interprétation vaut tous les prix du monde. Film choc.
Disponible en DVD et Blu-ray chez Ad Vitam.