Ablations, d’Arnold de Parscau

 

Ablations, d'Arnold de ParscauUn homme se réveille en pleine nature, sans souvenir de ce qui lui est arrivé. Rentré chez lui, il se découvre une grande cicatrice dans le bas du dos. Après avoir consulté son ancienne maîtresse, chirurgienne, l’évidence s’impose : on lui a enlevé un rein.

« J’y crois pas. » Abasourdi, incapable d’offrir une meilleure formule, c’est ainsi que l’homme accueille la nouvelle. L’homme, c’est Denis Ménochet, acteur fabuleux qui porte le film sur ses épaules. A la fois fort et fragile, il incarne merveilleusement ce personnage peu à peu envahi par la rage et la folie. L’homme perd pied à la manière des héros lynchiens : dans un bordel, référence directe au surréaliste One-Eyed Jack’s, l’établissement de luxure aux couleurs chaudes de Twin Peaks. Le héros d’Ablations croit y voir son ravisseur, tapi dans l’ombre, comme il croit apercevoir des cicatrices sur tous les corps. De sous-jacente, la folie va se faire grandissante au fur et à mesure de son enquête ; des rêves éveillés lui offrent une réalité déformée, dans laquelle il se bat pour sauver son rein et découvrir la vérité. Séquences magnifiques de maîtrise formelle et d’ingéniosité signées Arnold de Parscau. Le tout jeune (25 ans) réalisateur avait précédemment réalisé un superbe clip pour « Good Day Today » de David Lynch ; c’est dire si l’influence du cinéaste sur Ablations est consciente. Pourtant, au gré de l’évolution du récit, de Parscau parvient avec facilité à s’émanciper de son modèle et donne au film une nouvelle tournure, davantage centrée sur l’enquête, dans laquelle pointe le second degré. On retrouve alors la patte de Benoît Delépine, scénariste du film et roi de l’absurde concret. L’humour – souvent pathétique – trouve une place idéale autant dans la rencontre entre le protagoniste et un vétérinaire que dans ce couple de cinéma à l’autodérision naturelle : Yolande Moreau et Philippe Nahon, toujours parfaits. Casting de rêve, mise en scène au cordeau, récit surprenant, emprunts cinéphiliques jouissifs : rien ne manque dans Ablations. Sauf un rein.

 
Ablations d’Arnold de Parscau, avec Denis Ménochet, Virginie Ledoyen, Philippe Nahon, Yolande Moreau, Florence Thomassin, Serge Riaboukine et un rein. France, Belgique, 2013. Sortie le 16 juillet 2014. Présenté en compétition au 21e Festival du film fantastique de Gérardmer.