Portrait de Jan Kounen

 

Tout à Kounen

Jan Kounen, président du jury du 21e Festival du film fantastique de GérardmerIl y a un pont. Un pont surplombant le monde, reliant en quelques points le cinéma de genre, la publicité, le chamanisme, les Pays-Bas, la haute couture, Joël Houssin, la musique classique, les chiens, Jean-Christophe Granger, le mysticisme, la violence, Jean-Michel Charlier, Frédéric Beigbeder, le polar…

Ce pont, c’est Jan Kounen. En deux décennies, le président du jury du 21e Festival international du film fantastique de Gérardmer a prouvé que l’on pouvait toucher à bien des sujets sans perdre son intégrité ou ses envies. Avec Mathieu Kassovitz, Christophe Gans ou Gaspar Noé, le cinéaste fait partie d’une génération qui a su s’approprier des genres codifiés, notamment par le cinéma américain, et les transcender au profit d’une singularité typiquement française, malgré certaines réticences critiques (voir la scène où Romain Duris se torche avec Les Cahiers du cinéma dans Dobermann).

Primé à Avoriaz pour son court-métrage Gisèle Kérozène en 1989, et adoubé de fait par le « cinéma de genre » dans ce qu’il avait de plus représentatif à l’époque, Kounen n’a cessé de surprendre sans hésiter à alimenter les controverses courant à son encontre. On songe ainsi à l’ultraviolence montrée dans Dobermann, ou aux très grandes libertés prises vis-à-vis de l’œuvre de Charlier et Giraud dans Blueberry. Intitulé Blueberry, l’expérience secrète, ce projet représentait un sacré challenge de par son tournage, son casting international et l’univers réputé inadaptable de sa BD d’origine.

Pour autant, Kounen va en tirer une œuvre extrêmement personnelle, dans laquelle chamanisme, psychotropes et sciences occultes viennent court-circuiter le western traditionnel. Un choix que beaucoup regretteront, par fidélité avec le matériel original. Après deux documentaires dans la même inspiration, soit l’ésotérisme sud-américain, le retour de Kounen vers une adaptation littéraire prouve à tous ceux qui en doutaient les qualités de mise en scène du cinéaste. Il s’approprie, malgré le poids du roman initial, 99 francs avec le regard d’un expert de la culture pop, ayant digéré les codes de la publicité et du postmodernisme pour mieux en fournir une critique par l’image. C’est désormais sur cette facette de sa carrière que nous voyons le réalisateur originaire des Pays-Bas : de Coco Chanel et Igor Stravinsky et du Vol des cigognes pour Canal +, on retient les qualités esthétiques notables de leur auteur. Après son passage dans les Vosges en 2014, reste à Kounen de briller à nouveau avec un projet d’inspiration encore plus personnelle pour convaincre ses derniers détracteurs.

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