Deux docs militants : Un coupable idéal et Zambie : à qui profite le cuivre ?

 

Si vous en avez ras le bol de racheter chaque année une nouvelle version d’un ancien Star Wars, mais vous n’y pouvez rien c’est plus fort que vous, il est encore temps d’investir intelligemment vos brouzoufs. Aucune chance que je vous conseille le nouveau film de Francis Veber puisqu’il n’a rien osé présenter au public depuis L’Emmerdeur, ni même le dernier documentaire de BHL sur son implication dans le bordel libyen car il faut savoir dire stop. Stop.
Je vous recommande deux documentaires édités aux éditions Montparnasse :

Un coupable idéalLe premier, Un coupable idéal réalisé par Jean-Xavier de Lestrade, retrouve les bacs pour fêter ses dix ans dans une version augmentée dans les bonus de scènes initialement coupées et, cerise sur le gâteau d’anniversaire, agrémentée d’un exceptionnel entretien avec Brenton Butler, l’adolescent accusé à tort du meurtre de Mary Ann Stephens. Le Brenton terrifié est devenu un homme. Nous le rencontrons chez lui, apaisé et heureux.
Quoi ? Eh bien oui ! Le documentaire peut aussi s’offrir un lifting en s’évitant même l’apparition inopinée d’un Jabba The Hutt de synthèse. Comme quoi tout est possible !
Autre temps fort riche d’enseignement, les avocats de Butler se remémorent leur combat contre le système, pourquoi ils n’ont rien voulu lâcher et comment l’affaire a bouleversé leur vie personnelle et professionnelle. Cinéaste humaniste, Jean-Xavier de Lestrade choppe les âmes. Les textes de loi restent au fond des tiroirs.
Un coupable idéal raconte deux tragédies ; la mort de Mary Ann Stephens abattue à bout portant d’une balle dans la tête sous les yeux de son mari et le barnum judiciaire autour de la fameuse question jamais réglée sur les couleurs de peau.
Le coupable idéal, c’est l’homme des minorités, déjà prisonnier, déjà condamné, haché menu par une justice expéditive. Pour notre salut, des hommes de valeur osent s’élever contre les réseaux de pouvoir qui se contentent d’affaires mal ficelées, surtout quand elles tournent en leur faveur.
Aux aguets, le cabinet de Patrick McGuiness s’est élevé en ardent défenseur, une tonne d’arguments en bandoulière. C’est cet homme, McGuiness (aidé par une formidable collègue), qui a balayé d’un revers de la main les conclusions d’enquêteurs peu regardants. La démonstration de l’innocence est implacable, tout comme l’implication zélée de la police à bidonner ses procès-verbaux. Ces salauds n’ont pas une seconde hésité à créer un coupable de toute pièce et ce, pour de simples raisons de politique locale. Tromper le jeune Butler au risque de l’envoyer le restant de sa vie en prison, trahir la famille de la victime, salir une institution, les flics du cru ont présenté à la barre un sens du devoir très personnel à défaut de donner une image exemplaire de leur petite personne. Il est insupportable de voir monsieur Stephens, persuadé d’avoir reconnu l’assassin, s’incarner le temps d’une audience en salaud de service, entraîné dans la vague du déshonneur.
Le documentaire, bijou de construction, expose, interroge, nous interroge, enquête, avance, solutionne, dénonce les abus, souligne les excès, réhabilite, rend hommage et n’hésite pas à pointer du doigt la lumière dans cet océan d’enfer kafkaïen.
Documentaire honoré par un Oscar, nous comprenons mieux pourquoi.

Zambie : à qui profite le cuivre ?Le coffret Albert Londres regroupe les documentaires récompensés du prix du même nom depuis 1985. Il me semble en avoir déjà parlé dans un article précédent mais je préfère le répéter encore et encore au risque de radoter ; procurez-vous ce coffret. Il raconte notre monde mieux que l’Encyclopédie Larousse Universelle.
Cette année sort Zambie : à qui profite le cuivre ?, reportage édifiant primé en 2012. Audrey Gallet et Alice Odiot reviennent sur le scandale de l’exploitation des ressources de l’Afrique par les puissances occidentales en ciblant leurs recherches sur une mine de cuivre, en Zambie. Comme vous le savez, les richesses du continent africain demeurent (jeu de mots !) dans votre téléphone portable ou dans le prochain I-bidule. Piller l’Afrique, asservir l’Asie, tout ça pour sauver un candidat de Nouvelle Star ! Mais ceci est une autre discussion de comptoir.
L’intérêt du documentaire se porte sur l’art et la manière de sucer jusqu’au trognon ; la multinationale Glencore (pensez à Monsanto…) exploite (dans tous les sens du terme) le site, ignore la population, contamine les habitants, corrompt les hommes politiques et s’affranchit derrière une banque d’investissement européenne, j’en passe et des meilleures. Bref, Zambie : à qui profite le cuivre ? devrait titiller votre curiosité autant que votre pouvoir d’indignation.
Le DVD contient « La révolution libyenne » d’Alfred de Montesquiou, livret auréolé du 74e Prix de la presse écrite. Cette chronique documentée revient sur les débuts de l’insurrection jusqu’à la chute du dictateur. Le style enlevé de l’auteur nous emmène au cœur des événements, c’est très appréciable et rudement utile. De la belle ouvrage.

 
DVD disponibles aux éditions Montparnasse

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