Mustang, de Deniz Gamze Ergüven

 

Mustang, de Deniz Gamze ErguvenDes cascades de cheveux bruns, des sous-vêtements roses et des gloussements étouffés : tout un univers d’adolescence au féminin s’épanouit au premier étage d’une maison de la Turquie rurale, sur les rives de la mer Noire. Cinq jeunes sœurs y vivent en toute complicité, sous l’œil inquiet d’une grand-mère soucieuse du qu’en-dira-t-on. Une remarque d’une voisine conservatrice fait tout basculer, changeant la demeure en prison blanche où les seuls invités sont les familles de fiancés potentiels.

Le premier long-métrage de la réalisatrice turque Deniz Gamze Ergüven propose l’histoire intelligente d’une lutte entêtée pour la liberté, envers et contre les lourdes contraintes imposées aux femmes par la Turquie traditionnelle. Le récit est simple et clair de bout en bout, soutenu par une caméra souple et un montage précis. En toile de fond, la réalisatrice développe une esthétique touchante et colorée lui permettant de dévoiler sa connaissance intime du rythme domestique turc, des cuisines odorantes aux armoires pleines de linge brodé.

On reconnaît un thème connu. Après la pièce La Maison de Bernarda Alba, par Federico García Lorca (1936), et le film Virgin Suicides de Sophia Coppola (1999), l’enfermement d’une communauté de jeunes femmes par de pervers gardiens pleins de bonnes intentions provoque encore une curiosité pleine de fantasmes. La ressemblance trouve toutefois ses limites : si les héroïnes désincarnées de Lorca et de Coppola portent en elles les germes de leur propre malheur, le gynécée de Mustang respire la santé et l’envie de vivre. Certaines têtes doivent tomber, d’autres se tiendront bien hautes, au prix du sacrifice d’une longue chevelure brune.

 
Mustang de Deniz Gamze Ergüven, avec Erol Afsin, Güneş Nezihe Şensoy, Doğa Zeynep Doğuşlu… France, Allemagne, Turquie, 2014. Présenté à la Quinzaine des réalisateurs 2015. Sortie le 17 juin 2015.