Insidious, de James Wan

 

Insidious, de James WanAlors qu’un jeune couple s’installe dans sa nouvelle maison, l’aîné de leurs enfants tombe dans un coma inexpliqué. Peu après, des phénomènes paranormaux viennent hanter leurs nuits…

Vendredi 13 oblige, j’ai eu envie de vous parler d’un bon film d’horreur. Et plutôt que de revenir aux sempiternels classiques, je préfère vous faire découvrir un film récent bien foutu qui rend justement hommage aux canons du genre. Car Insidious doit beaucoup à ses prédécesseurs : à Shining, le réalisateur James Wan emprunte l’utilisation savante des couloirs et l’enfant spirite. A Poltergeist, L’Emprise et Ghostbusters, la relation trouble technologie/surnaturel et l’humour scientifique geek. A L’Exorciste, le thème de la possession, envisagée une fois toutes les autres explications écartées. Citons encore comme références Amityville, Deux sœurs, La Malédiction et bien sûr le récent Paranormal Activity (ce dernier se situant bien en deçà d’Insidious). Cet exercice ultraréférencé aurait pu être casse-gueule, mais James Wan et son scénariste Leigh Whannell prennent suffisamment de liberté pour donner à Insidious sa propre identité.
Le metteur en scène instaure très vite un climat malsain, et oppose les plans extérieurs larges de la demeure aux couloirs labyrinthiques et aux bruits de craquements de l’intérieur : extérieur = sécurité ; intérieur = danger. Les meilleurs films d’horreur se sont construits sur ce renversement des valeurs. En théorie, le foyer constitue le cocon familial, le lieu de sécurité où trouver refuge en cas de problème. L’Exorciste ou Poltergeist ont cela d’étouffant que l’horreur survient « à la maison », lieu domestiqué et aimé, dernier rempart à la folie du dehors.

Avec du vieux, on peut faire du neuf : si James Wan s’inspire de ses pères, il n’hésite pas non plus à les bousculer. L’esprit qui hante la maison n’est ni une âme en peine ni Lucifer, mais juste… un démon. Simplement. Pas le dieu des enfers, un simple démon, qui tente d’ouvrir une brèche entre son monde flottant et notre réalité. Il ne met pas en danger l’humanité entière mais simplement une cellule familiale, ce qui le rend plus intime, plus palpable, plus réel. Plus flippant. D’autant que le réalisateur prend le temps de surprendre plutôt que de chercher le frisson facile. Si certaines ficelles sont un peu grosses (les dessins de l’enfant pour authentifier a posteriori la thèse du démon sont, avouons-le, un peu lourdingues), l’apport d’éléments originaux et étranges accentue l’efficacité d’Insidious : la gentille mamie médium secondée par deux geeks porte un masque à gaz parfaitement morbide pour communiquer avec l’au-delà, des musiques enfantines et malfaisantes surgissent par enchantement, le démon ressemble tantôt à un pantin désarticulé, tantôt au Dark Maul de Star Wars… Et Insidious comporte même quelques images subliminales méchamment réussies – que je ne dévoilerai pas ici pour ne pas gâcher le plaisir.

Avec Saw, James Wan avait inventé un genre horrifique et un type de serial-killer, le « tueur au puzzle ». Tout comme Insidious, Saw se voulait d’abord un hommage (à Seven et Mad Max notamment), dont les défauts s’effaçaient devant l’ingéniosité. Si les suites de la franchise, non réalisées par Wan, étaient aussi mauvaises que gore, ce premier épisode jouissait de réelles qualités et de trouvailles géniales. Il en va de même pour Insidious, qui se regarde avec plaisir, effroi et nostalgie des bons vieux films d’antan.

 
Insidious de James Wan avec Patrick Wilson, Rose Byrne, Ty Simpkins… Etats-Unis, 2010. Sortie le 15 juin 2011.