Guerrière, de David Wnendt

 

Guerrière, de David WnendtMarisa habite dans un bled paumé de l’Allemagne du Nord, elle fait partie d’une bande de néonazis. Sa route va croiser celle de Svenja, en rupture avec son foyer trop strict et Razul, un jeune sans-papiers afghan qui cherche à rejoindre sa famille en Suède…
Au début, on craint un American History X version allemande, avec une figure aînée en quête de rédemption et une jeune aveuglée par sa haine naissante qui commence juste à se cristalliser et trouver un défouloir. Mais en fin de compte, le constat est plus mitigé. Premier film de son réalisateur, qui est aussi son film de fin d’études, Guerrière bénéficie d’une recherche en amont sur le milieu néonazi très particulier de ces petites bourgades allemandes où l’ennui et le chômage sont le pain quotidien. Et pourtant ce n’est pas cet aspect documentaire qui est le plus convaincant. Certes on y croit, à cette vie qui n’offre aucune perspective à une jeunesse à la dérive, mais il reste quelques clichés dans les personnages qui donnent l’impression que tout cela est tout de même une vision assez superficielle des mouvements néonazis (bière à gogo, visionnage de films de propagande nazis, balades en voitures avec punk nazi à plein volume…). Et quand bien même ce que décrit David Wnendt était bien réel, cela n’empêche pas que, malgré leurs efficacités, ces scènes n’ont pas la même force qu’un seul regard de son actrice principale. Alina Levshin est tout simplement une révélation. A la fois fragile, butée, révoltée, en attente d’affection, son personnage est complexe, touchant, toutes ses scènes sont intenses sans qu’elle ait besoin de forcer. Sa justesse donne une vraie grâce au film. Si le scénario ne se focalisait que sur son personnage, peut-être aurait-il gagné en émotion, en profondeur. Car les histoires annexes n’ont pas le même impact malheureusement. L’histoire de Svenja est assez prévisible et la quête du jeune sans-papiers accentue le côté très « scénarisé ». On sent l’envie d’une construction alambiquée où les destins se croisent, s’échangent et… Mais c’est bien Marisa qui porte le film. Filmée comme une vraie guerrière avec ses tatouages, son énergie, c’est son parcours qui donne sens à la thématique du film et c’est aussi par cela qu’il échoue, cédant à la nécessité mélodramatique de manière trop convenue.
Loin d’être un mauvais film, Guerrière est un drame intimiste, un fin portrait pris d’une trop grande ambition. Il a les défauts d’un premier film qui veut tellement donner qu’il en oublie presque son vrai sujet : son personnage principal. Très bien filmé et mis en scène avec un vrai sens de l’atmosphère, le film gagne à être découvert, ne serait-ce que pour assister à la naissance d’une actrice.

 
Guerrière de David Wnendt, avec Alina Levshin, Jella Haase, Sayed Ahmad Wasil Mrowat… Allemagne, 2011. Sortie le 27 mars 2013.

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