Les Bêtes du sud sauvage, de Benh Zeitlin

 

Les Bêtes du sud sauvage de Benh ZeitlinLes Bêtes du sud sauvage raconte l’histoire de deux habitants du bayou louisianais, Hushpuppy, une petite fille de 6 ans, et son père Wink. Quand ce dernier tombe malade, que la nature se déchaîne et que des aurochs préhistoriques font route vers le Bassin, Hushpuppy décide de partir à l’aventure et de trouver ce qui sauverait sa famille – une maman, éventuellement.

Une odyssée dans le bayou : en voyage dans la région pour un court-métrage en 2006, Benh Zeitlin découvre la Louisiane et ne la quittera plus. Source d’inspiration en littérature (James Lee Burke, maître du roman noir, fait s’y dérouler la plupart de ses intrigues) comme au cinéma (Robert Flaherty avait consacré un film merveilleux à la région en 1948 : Louisiana Story), la Louisiane passionne. Peut-être parce qu’avec les catastrophes naturelles, la vie y est plus fragile, plus précaire, donc plus précieuse. Peut-être parce que sa culture est multiple – cajun, créole et néo-orléanaise –, donc plus riche. Benh Zeitlin s’inspire de la région pour créer le Bassin, microcosme perdu au milieu du bayou où évoluent des personnages uniques, sauvages et indomptables. Des personnages forts en gueule qui affrontent la nature autant qu’ils la vénèrent.

Les Bêtes du sud sauvage tient du conte initiatique panthéiste et halluciné. L’univers créé par Benh Zeitlin et sa coscénariste Lucy Alibar – le film est une adaptation de sa pièce Juicy and Delicious – slalome entre rêve et réalité : après une montée des eaux apocalyptique, on y croise des poissons qui s’attrapent à la main et des aurochs en transhumance qui détruisent tout sur leur passage, comme le pétrole de BP déversé par millions de litres dans le bayou anéantit la vie. Si tout cela est possible, c’est parce que la caméra épouse le point de vue d’Hushpuppy, magnétique gamine de 6 ans (jouée par une impressionnante Quvenzhané Wallis). Dans la réalité d’Hushpuppy, on trouve aussi bien des animaux terrifiants qu’une mère fantasmée. Le réalisateur crée une fable à l’identité visuelle marquée et à la narration cassée. Si l’ombre de Terrence Malick plane – les images, la musique, la narration à hauteur d’enfant qui rappelle Les Moissons du ciel -, jamais elle ne parvient à amoindrir la claque esthétique et émotionnelle reçue devant ces Bêtes du sud sauvage. Conçu comme une déclaration d’amour à la Louisiane, le film souligne aussi l’extrême urgence de prendre en compte une population et une culture qui disparaissent au profit d’industries et du monde « de l’autre côté du pont », fade et sans surprise, un monde où la magie n’a plus sa place.

 
Les Bêtes du sud sauvage de Benh Zeitlin, avec Quvenzhané Wallis, Dwight Henry, Levy Easterly, Lowell Landes, Pamela Harper, Gina Montana, Amber Henry… Etats-Unis, 2011. Sortie le 12 décembre 2012. En sélection Un Certain Regard au 65e Festival de Cannes. Caméra d’or du 65e Festival de Cannes. Grand Prix du 38e Festival du cinéma américain de Deauville.

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