Une sélection animée pour la rentrée

 

L’Odyssée de Kino, Les Chroniques de la guerre de Lodoss, La Mélancolie d’Haruhi Suzumiya, La Traversée du temps, Summer Wars, 5 cm per Second, voilà autant de petits bijoux exposés chez Kazé et qu’il me plaît à chérir dès que le cinéma traditionnel me court sur le haricot. Mon petit écran en redemande, le coquin. Les nouveautés de la rentrée 2012 réservent leurs lots d’émotions puisque les thèmes abordés n’ont jamais été autant d’actualité depuis le tsunami meurtrier et la catastrophe de Fukushima. Le Japon panse ses plaies et à travers ces animés exorcise ses peurs. Présentation des nouveautés.
 

Voyage vers Agartha de Makoto Shinkai (2011)

Voyage vers Agartha, de Makoto ShinkaiDepuis la mort de son père, Asuna trouve la paix dans les collines. Dès la sortie de l’école, elle crapahute, s’enivre de nature, court jusqu’à son refuge secret. Alors qu’elle se rend sur son rocher préféré, un monstre antédiluvien l’attaque. Shun, un garçon sorti de nulle part la sauve des griffes de la bête. Avant de s’en aller, Shun invite Asuna à se rendre dans un monde appelé Agartha. Là-bas, on peut y ressusciter les êtres chers. Avec l’aide d’un de ses professeurs, Asuna quitte sa maison pour s’enfoncer dans l’inconnu.
Après les immenses 5 cm per Second, La Tour au-delà des nuages et Voices of a Distant Star, Makoto Shinkai récidive dans l’animé spirituel et initiatique. Son travail lorgne du côté de Hayao Miyazaki pour le bestiaire et Mamoru Hosoda pour les univers dystopiques.
Voyage vers Agartha se divise en tableaux où Asuna forge son caractère lors d’épreuves qui la ramènent à repenser ses fondamentaux sur la nature humaine. Là où une Nausicaä accomplie mène les troupes en Jeanne pucelle et vengeresse, Asuna découvre la complexité d’une vie intérieure et du monde qui l’entoure. Elle est seule. Elle grandit. Elle mûrit.
Voyage vers Agartha laisse peu de répit à son héroïne tant elle enchaîne les épreuves. Toutes ces accumulations d’expériences, trop nombreuses à mon goût, décrédibilisent le parcours initiatique programmé pour Asuna. D’un point de vue plus technique, les séquences frénétiques rendent les pauses « ventre mou ». Asuna aurait besoin de souffler comme dans ses collines pour vivre le pouvoir du moment présent (dit un spiritualiste canadien bien connu). Agartha l’Ancien Monde est un monde en sursis. Le temps presse…
Un magnifique animé d’aventure sur l’amour, l’amitié et le deuil. A voir et à revoir.
 

Colorful de Keiichi Hara (2010)

Colorful, de Keiichi HaraTrop expliquer Colorful serait dévoiler le mystère de l’intrigue, je vais donc m’affairer à utiliser ma paire de pincettes préférées. Prudence est mère de sûreté ; le résumé officiel fera l’affaire.
Un esprit gagne une deuxième chance de vivre à condition d’apprendre de ses erreurs. Il renaît dans le corps de Makoto, un élève de troisième qui vient de mettre fin à ses jours. L’esprit doit endurer la vie quotidienne de cet adolescent mal dans sa peau. Avançant à tâtons, s’efforçant de ne pas reproduire les fautes de Makoto, il va finalement découvrir une vérité qui va bouleverser son existence.
La nouvelle vie du nouveau Makoto n’est pas une mince affaire ! Au collège et à la maison, il met à jour les secrets de son entourage et, choqué par toutes les révélations, s’enferme dans une colère sourde. Pura Pura, conscience supérieure qui lui a offert un retour sur Terre, le motive à comprendre les erreurs de son ancien lui. Le temps est compté, une nouvelle fois.
Aucun pathos, aucune pleurnicherie, Colorful évoque avec tact les accidents de la vie qui peuvent toucher chacun d’entre nous. L’antihéros « malgré lui » apprend à relativiser les affres du quotidien. Makoto qui tente de démêler la vérité de l’illusion gravite autour d’une galerie de personnages qui, tous en proie à leurs propres démons, sapent ses efforts de discernement d’une réalité inattendue.
Un animé sensible aux inquiétudes de la jeunesse japonaise et de la place de la jeunesse dans la société nippone. Colorful ne manque pas de moments poignants.
 

Roujin-Z de Hiroyuki Kitakubo (1991)

Roujin-ZAu Japon. Un futur proche. Les hommes et les femmes qui le peuvent, profitent de tout le confort moderne dans une totale dépendance des grandes industries qui maîtrisent la haute technologie. Bouffez donc du Monsanto, le projet Roujin-Z s’occupera de vos couches et de votre caca ! Plus rien n’est impossible. Reste le problème du vieillissement de la population.
Une société prépare dans le plus grand secret la Z-001, une machine qui prodiguera tous les soins nécessaires aux personnes âgées. Kijûro Takazawa, grabataire, très malade, est le premier cobaye. Lui, préférerait encore sentir le doux parfum d’Haruko, sa jeune infirmière, que de subir les palpations d’un robot. Kijûro, abattu, prend le contrôle de la machine et se transforme en arme de destruction massive. La revanche des vieux a sonné.
Roujin-Z, animé craspec, limite dégueu, politiquement incorrect et brut de décoffrage, n’hésite pas à aborder les sujets qui fâchent et qui dérangent. Il n’y a pas si longtemps, nous respections nos aînés pour leur sagesse et leur expérience, aujourd’hui nous les admirons pour leur niveau de vie avant de les parquer du jour au lendemain dans les jardins d’Asclépios en résidence alzheimer.
De la question du vieillissement et plus particulièrement de la transmission des connaissances à la jeunesse, le Japon s’est toujours préoccupé. Roujin-Z n’aborde pas le volet le plus glamour de la problématique ciblant sa démonstration sur les horreurs de la déshumanisation. La déchéance est un marché juteux.
Roujin-Z possède un ton singulier, sérieux et irrévérencieux. Quel plaisir de voir Kijûro, nostalgique de sa jeunesse, incapable de communiquer, pétri de douleur, prendre pouvoir de sa machine et s’élever en un Transformer nouvelle génération pour s’en aller bouter les industriels véreux.
Une fable humaniste qui détonne. La volonté soulève des montagnes. La terreur de l’enfermement soulève le cœur. Ultrarecommandé.
 

La Disparition de Haruri Suzumiya, le film de Tatsuya Ishihara et Yasuhiro Takemoto (2010)

La Disparition de Haruhi SuzumiyaDurant toutes ces années où je me suis collé des animés dans les rétines, peu de séries m’ont autant plu que La Mélancolie d’Haruhi Suzumiya. Je précise que je ne me suis jamais au grand jamais revendiqué comme un spécialiste des séries animées japonaises (d’ailleurs je suis un total ignorant comparé aux aficionados du genre) mais plutôt comme un éternel néophyte, une sorte de puceau de la japanimation.
Au premier coup de crayon, je suis tombé raide dingue d’Haruhi, lycéenne folledingue, égocentrique, autoritaire, égoïste et névrosée. La série la présente comme une fille étrange attirée par les individus non moins étranges et les phénomènes paranormaux. Détail qui a son importance : Haruhi, prise de mélancolie, provoque des fractures spatiotemporelles qui permettent l’arrivée des monstres sur Terre. En moins de temps qu’il n’en faut, Haruhi embrigade des camarades de son lycée afin de prendre la tête (c’est le cas de le dire !) de « La brigade SOS ». Bien entendu, Haruhi se proclame chef de troupe. La brigade SOS se charge de mettre les monstres hors d’état de nuire.
Kyon, garçon rationnel au naturel méfiant, supporte de moins en moins les délires d’Haruhi même si, le cœur a ses raisons que la raison ne connaît point, il dissimule le mieux qu’il le peut une infinie tendresse à cette amie bien siphonnée.
Et le film ? Kyon se réveille dans un monde parallèle. Rien n’a changé, sa chambre est bien sa chambre mais au-dehors les gens ne sont plus les mêmes. Abandonné, il cherche ses amis et se rend compte à quel point les originaux de sa petite brigade lui manquent. A son tour il doit persuader les autres de la folie de la situation, eux qui maintenant goûtent le quotidien comme des gens « normaux ». Haruhi, elle, a bel et bien disparu.
Le film, très long (près de 2h40), vous rend addict. Je vous conseille la saison 1 avant d’attaquer la bête. Suis grand fan.
 

Mardock Scramble de Susumu Kudo

Mardock Scramble (c) Tow Ubukata/MS CommitteeMardock Scramble est tiré d’un roman (aujourd’hui une trilogie) de science-fiction japonais multiprimé et vendu à plus de 500 000 exemplaires. L’histoire (qui ne s’adresse pas aux bambins, aux enfants et aux pré-ados) simple comme bonjour raconte la vengeance de Rune Balot, jeune prostituée de 15 ans, transformée en cyborg après avoir été laissée pour morte par un tueur en série. Rune traîne les bas-fonds de Mardock City à la recherche du meurtrier.
L’animé est court, glauque et violent. J’y ai trouvé une forme de catharsis tout à fait jubilatoire dans un style tout à fait soigné. C’est gratuit, méchant et efficace. Sur le fond, l’animé n’a rien d’une promenade de santé raclant les bouges d’une ville perdue. Ah ce n’est pas La Mélodie du bonheur !
Un peu comme dans tous les animés précédents, Mardock Scramble projette une atmosphère anxiogène. Frappez avant d’entrer ! “Feel good movie” is not our business.

Tous les animés sont disponibles en DVD et Blu-ray chez Kazé.