Souvenirs de toiles d’Emilie Simon

 

Emilie Simon - (c) Lisa CarlettaA l’occasion de la sortie de son nouvel album, Mue, sans doute celui au plus fort potentiel cinématographique, Emilie Simon nous parle de ses souvenirs de toiles, revient sur ses bandes originales de films et livre un pan de son travail où musique et images sont intimement liées.

Votre premier film ?

Je crois que petite, je regardais des comédies musicales américaines. J’adorais West Side Story.

Le film qui a bercé votre adolescence ?

Je dirais Blade Runner de Ridley Scott, pour les acteurs, l’univers sombre, futuriste et surtout très esthétique.

L’acteur – ou l’actrice – disparu avec qui vous auriez aimé dîner ?

Marilyn Monroe ! Elle était troublante, d’une féminité à plusieurs niveaux. Elle incarnait à la fois la spontanéité, la sensualité, le naturel, mais elle avait en elle une autre façade, plus douloureuse. Elle était riche de toutes ces contradictions et c’est ce que je trouve fascinant chez elle.

Est-ce pour lui rendre hommage que vous apparaissez en blonde très féminine dans votre dernier clip, “Menteur” ?

Non, c’est un complet hasard, je ne m’en suis rendu compte qu’après…

Le film que vous auriez aimé réaliser ?

Je ne me suis jamais posé cette question ! J’aime les personnages sublimés qui évoluent dans un univers onirique, ludique et sombre et qui soit à la fois contemplatif et poignant. C’est ce que j’ai essayé de traduire en réalisant le clip de “Menteur”, justement.

Comment en êtes-vous venue, d’ailleurs, à la réalisation de ce clip ?

J’attendais la bonne histoire, le bon moment, mais ça m’intéressait de le faire depuis longtemps. Et “Menteur” m’est apparu comme le titre idéal pour commencer cette expérience. Mais c’était aussi parce que je me sentais en confiance, avec une équipe incroyable à Los Angeles qui m’a très bien entourée.

Les premières grosses larmes devant un film ?

Très certainement Love Story !

Et le film qui fait rire aux larmes ?

Alors là, je sèche… Ca fait bien longtemps que je n’ai pas vu une bonne comédie au cinéma. Je dirais Casse-tête chinois de Cédric Klapisch. Même si ce n’est pas une comédie à proprement parler, il y a beaucoup d’humour dans ce film.

La VHS que vous conservez précieusement ?

Malheureusement, je l’ai perdue quand j’avais huit ans. C’était L’Histoire sans fin

Votre héros préféré ?

J’adore les super-héros ! Mais je dirais Jackie Brown, car j’aime infiniment les héroïnes de Tarantino. Je me verrais bien en interpréter une, car elles forment un tout : on est à la fois dans le comics, mais avec un côté très féminin, très fort et décalé, toujours dans le deuxième degré.

Les réalisateurs de votre Panthéon ?

Il y en a beaucoup… Quentin Tarantino, Woody Allen, Jean-Pierre Jeunet, David Lynch… Mais j’ai surtout envie de citer Robert de Niro, qui est mon acteur préféré.

Votre musique, et encore plus dans votre dernier album, Mue, semble très inspirée par le cinéma…

Oui, ma musique est en effet très visuelle. Peut-être parce que j’ai grandi dans l’univers des comédies musicales. La musique et l’image sont liées dans ma tête, il y a là tout un univers invisible que j’essaie de retranscrire dans mes clips ou des séances photo. Il arrive donc fréquemment que ce soit le visuel qui donne vie à un morceau de musique, plutôt qu’un son. Mais je suis aussi perméable aux odeurs, aux textures. Parfois, c’est tout de même un son qui en inspire un autre, mais souvent, je suis touchée par une lumière, une couleur, une atmosphère. Ca a toujours été ma manière d’écrire.

Comment composez-vous ?

J’écris et compose seule en général, mais je demande parfois à des artistes, des auteurs, de travailler avec moi, ça permet une respiration très agréable. Dans mon travail, il y a toute une part d’expérimentation. Les choses se révèlent au fur et à mesure. J’ai toutefois un cadre et une direction en tête afin de pouvoir commencer un projet, mais je n’ai pas encore songé à tout, sinon, je pense que ça m’apparaîtrait figé. En commençant un album, je ne sais jamais ce qui m’attend et c’est précisément ça qui m’intéresse.

Mue parle beaucoup de Paris et semble plus romantique et posé, tandis que The Big Machine était plus foisonnant et rythmé…

Mue, d'Emilie SimonEn effet, j’ai composé The Big Machine à New York et Mue à Paris. Les lieux m’influencent énormément, ce que les gens dégagent, comment ils vivent, leur façon d’être dans un café par exemple. J’observe et j’absorbe, je suis sensible à tout ce qui m’entoure. Pour Mue, Paris est venue naturellement, car j’avais très envie de poésie, de lumière, de douceur et de gaieté. Petit à petit, les textes sont apparus, inspirés par Paris, même si ce n’était pas une volonté initiale.

Avec deux bandes originales à votre actif, vous êtes également sollicitée par le cinéma. Comment ces collaborations ont-elles eu lieu ?

On est venu me chercher à chaque fois. Je fais du sur-mesure pour chaque réalisateur, en totale confiance mutuelle, car si l’on vient me chercher, c’est que l’on a déjà une affinité avec mon univers, une envie de faire passer les images par mon prisme musical. Pour chaque film, le processus a été différent. Par exemple, pour La Délicatesse, David Foenkinos m’a montré quelques images du film, mais il m’envoyait en parallèle des scènes dialoguées. C’est comme ça que j’ai pu me rendre compte du rythme du film. Pour la Marche de l’empereur, Luc Jacquet m’a montré des heures de rushs, il m’a raconté l’histoire avec passion et c’est de ce partage qu’a pu découler mon travail, décliné sur différents thèmes [cette bande originale a été couronnée d’une Victoire de la musique en 2006, ndlr]. Et pour Quand je serai petit, Jean-Paul Rouve désirait un morceau simple, avec du piano : il a choisi la chanson Jetaimejetaimejetaime. C’est vraiment du cousu main, en somme !

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